Dans cet article, vous trouverez la troisième partie de l’interview exclusive de Dolph Lundgren, star de films d’action, par mon collègue acteur Aléric Flair.
“Dolph Lundgren – Train Like an Action Hero – Be Fit Forever”, éditions Skyhorse Publishing.
Dolph Lundgren, acteur de films d’action d’origine suédoise, à jamais Ivan Drago, le méchant de Rocky IV (1985), film iconique illustrant le dernier round de l’Amérique face à l’URSS. Champion de Karaté, étudiant modèle titulaire d’une bourse d’ingénieur chimiste au prestigieux MIT, il n’aura pas la carrière d’un Jean-Claude Van Damme, Arnold Schwarzenegger ou encore Sylvester Stallone (son mentor), mais il aura su s’établir en tant que figure incontournable parmi ces héros virils émergeant dans les années 80. Les amateurs de films de baston continuent à l’apprécier depuis les années 90, dans des films qu’il réalise parfois lui-même et sortent directement en vidéo, quand ce n’est pas sur grand écran dans les très nostalgiques Expendables.
Son livre de conseils sportifs (Train like an action hero – 2014), comme son parcours au cinéma, intéresseront de nombreux apprentis acteurs, particulièrement ceux rêvant de films d’action.
Interview de Dolph Lundgren (3ème partie) : Le jeu d’acteur dans un film d’action.
Aléric Flair : Parlons cinéma maintenant. Vous avez réalisé 5 films. Quand vous dirigez, demandez-vous à vos comédiens de suivre un entraînement spécifique ?
Dolph Lundgren – Pas réellement. Je n’ai pas encore dirigé de film sur des athlètes. Mais si vous devez interpréter quelqu’un avec des talents particuliers, il est souhaitable de les pratiquer vraiment. Si vous jouez un officier de police en civil ou en uniforme dans l’un de mes films, je vais vous demander de vous entraîner avec des policiers professionnels. Comme ça vous connaîtrez la sensation de tirer avec une arme et de vraies munitions. Si vous tirez avec de vraies balles vous montrez ensuite un certain respect pour l’arme, vous la tenez d’une certaine façon et vous ne la pointez pas sur quelqu’un quand vous la chargez. Quand les acteurs n’en sont pas passés par là, ils ont tendance à manier les armes sans précaution.
A.F: Quand un boxeur ou un artiste martial est engagé dans un film, devra-t-il apprendre des choses particulières pour jouer devant la caméra ou peut-il juste se battre comme en compétition ?
Dolph Lundgren – Vous devez apprendre quelques trucs. Un boxeur a une garde serrée [Dolph met ses bras devant lui en position de protection, dans une posture de boxe classique]. Un boxeur ne veut pas être touché, il doit protéger son corps, tout est serré. Si vous lancez un crochet vous faites cela [Dolph lance un crochet du droit rapide et près du corps] dans un film pour le montrez à la caméra, vous l’élargissez un peu [Dolph lance un crochet du droit plus ample].
Pour le cinéma vous allez aussi apprendre à recevoir un coup. Sur un ring vous évitez d’en prendre, car ce sont… de vrais coups. Sur un plateau de tournage vous regardez le poing de votre adversaire et penchez la tête. Vous devez bouger votre cou comme ça [Dolph montre le rapide mouvement d’évitement de la tête]. Ces techniques je les ais apprises dès le début de ma carrière en jouant dans Rocky IV. Je les ais pratiquées avec Sly [Sylvester Stallone] durant les 5 mois de préparation du film, puis les 3 mois du tournage. Le genre de formation que l’on n’oublie jamais.
Donc oui, même si vous êtes un excellent combattant dans la vie, mettre des coups devant une caméra demande un apprentissage parfois intense.
A.F: Est-il important pour vous que les arts martiaux soient réalistes au cinéma ? Ou doivent-ils juste divertir les gens ?
Dolph Lundgren – C’est une bonne question. Cela dépend du genre de film. Une vraie bagarre de rue dure de 10 à 15 secondes maximum. Dans la vie, vous n’allez pas vous retrouver au sol en train d’enchaîner les prises, il y aura généralement une troisième personne pour vous assommer avec une chaise ou vous séparer.
Tourner un long métrage avec des bagarres ultra-réalistes serait un vrai challenge. Je n’ai jamais fait ça, même si parfois ça y ressemble un peu. Ça me plairait d’en tourner un, ça serait cool! Je me demande comment les spectateurs réagiraient. Je n’ai pas non plus joué dans des films de super héros, où les personnages font 5 sauts périlleux arrière et reçoivent 20 coups à la tête, le tout sans aucune goûte de sang. La plupart des productions dans lesquelles j’apparais sont entre les deux. On essaye d’approcher un certain réalisme tout en gardant une licence dramatique sur l’action pour divertir le public.
A.F: Et si nous parlions d’acting ? Au delà de la préparation sportive comment avez-vous travaillé le personnage de Gunnar des Expendables ?
Dolph Lundgren – C’était un chouette rôle, bien écrit, riche en couleurs. Gunnar est d’un côté un gars d’une grande loyauté, mais d’un autre il est complètement dingue. Il a des problèmes de drogue et d’instabilité émotionnelle. C’est “fun” de travailler sur ce genre de personnages, il y a beaucoup de choses à explorer.
Les dialogues d’un film sont généralement courts, sauf chez Tarantino où vous avez de longues répliques! (Rires) Dans la plupart des scénarios je n’ai qu’une ou deux lignes à la fois, alors pour échauffer le personnage je cherche un monologue qui lui correspond. Par exemple pour Gunnar, le mien venait de la pièce Hurlyburly dont j’avais vu l’adaptation cinématographique avec Sean Penn. Ce dernier y jouait un cocaïnomane, complément fou. Hurlyburly, c’est 3 hommes dans un appartement fumant de l’herbe, sniffant de la coke et parlant de gonzesses. J’ai donc trouvé un monologue de la pièce capable de me plonger dans cet état de folie.
Dans certaines scènes, Gunnar est très bavard et pète les plombs – « Arrrrggghh ! » [Dolph joue Gunnar qui devient fou] alors que dans d’autres scènes il est juste froid, calme, il ne bouge pas – « You dont trust me ? » [Dolph joue Gunnar le regard vide et froid]. Quoi qu’il en soit, c’était un personnage amusant à travailler. Parfois ce n’est pas aussi “fun”, quand le personnage est mal écrit, c’est plus dur… Vous devez pourtant trouver quelque chose qui vous motive dans le rôle, qui vous fait sentir qu’il va être “fun” à jouer. Que ce soit un méchant, un gentil, ou un caractère tragique, ça doit rester excitant à jouer pour l’acteur ; trouvez-lui un accent bizarre, par exemple.
A.F: Travaillez-vous avec un coach d’acteurs ?
Dolph Lundgren – Parfois, oui. Mais souvent je trouve utile de collaborer avec d’autres acteurs. C’est comme une séance de sparring sportif. Je travaille d’abord le personnage seul et ensuite je le teste devant les autres acteurs, pour voir ce qu’ils en pensent. Les acteurs sont intelligents, ils peuvent avoir de bonnes idées et donner de bons conseils. De cette façon vous arrivez sur le tournage avec plusieurs façons de jouer les scènes. Vous pouvez aussi rejoindre le plateau avec des actions, des intentions et des accessoires que vos partenaires et le réalisateur ne connaissent pas, vous allez les surprendre. Ça va être plus “fun”. Et si le réalisateur vous demande quelque chose de totalement différent de ce que vous avez préparé, ne vous inquiétez pas : vous pourrez toujours utiliser ce travail effectué en amont.
A.F: Parmi tous vos personnages, lequel est le plus proche de vous et lequel est le plus éloigné ?
Dolph Lundgren – Oh m…, ça c’est une colle! Bah, ils sont tous moi. Ils sont tous proches de moi, c’est moi qui les joue! (Rires) Dans Rocky IV, l’iconique Ivan Drago est proche du jeune Dolph Lundgren débarquant à Hollywood. Pour lui comme pour moi tout était nouveau là-bas. Stallone a joué sur cette similarité, c’était rusé de sa part. Il procède de même avec son personnage, Rocky. Il le fait évoluer avec lui au fur et à mesure qu’il vieillit et acquiert de l’expérience. Dans le premier Rocky, il est marginal, a le nez tordu, c’est un gars un peu paumé, alors que dans Rocky III, il vit dans une résidence luxueuse, roule en Rolls, porte de beaux costumes et a le nez refait, il a changé, comme Stallone a changé avec le succès. Dans le film que je viens de terminer, Skin Trade, il est question d’un trafic de jeunes femmes. Pour certaines scènes j’ai utilisé ma paternité: j’ai deux filles dans la vie. J’ai imaginé ce que j’éprouverais si elles étaient enfermées dans ces cages. Ces séquences sont assez fortes au final, je pense. Elles montrent un côté différent de ma personnalité.
Les personnages qui ne sont pas moi… (Réfléchissant) eh bien Gunnar des Expendables, particulièrement dans le 2ème volet, c’est une brute alcoolique qui tue des gens, il a deux neurones, d’une certaine façon ce n’est pas moi… enfin j’espère (Rires). Mais il était marrant à jouer.
A.F: Et le personnage des Universal Soldier? Il est extrêmement froid.
Dolph Lundgren – Oh oui! Universal Soldier c’est encore autre chose, c’est aussi un dingue assez éloigné de moi, c’est une sorte de machine…
A.F: Une fois lu Train Like an Action Hero, peut-on s’inspirer du mode de vie d’autres acteurs ? Vous parliez de Robert Mitchum ?
Dolph Lundgren – Heu … Robert Mitchum était un mec cool, mais il est allé en prison plusieurs fois, il fumait trop d’herbe et se bagarrait pas mal. Donc je ne penserai pas à lui (Rires)! Un homme qui est un bon exemple c’est Clint Eastwood. Il n’a jamais été un grand athlète, mais il s’est toujours maintenu en bonne forme. A l’époque de ses vieux films, Il courait, il s’entraînait et levait de la fonte régulièrement. A la soixantaine passée, il avait belle allure et pouvait tenir un rôle romantique face à Meryl Streep (Sur la route de Madison). Il réalise encore des films aujourd’hui à 84 ans, et je peux vous assurer que chaque tournage est une épreuve physique pour un réalisateur. Stallone aussi est un bon exemple, il est en sacrée grande forme pour un homme de 67 ans, et vous pouvez lui parler de n’importe quel groupe de musique récent, n’importe quelle sortie ciné, il se tient au courant de tout..
A.F: Une dernière chose que vous voudriez dire aux aspirants acteurs de Etreacteur.fr au sujet de votre livre ?
Dolph Lundgren – (Réfléchissant) Eh bien, j’espère que mon livre pourra être une petite source d’inspiration pour eux. Vous savez, la plupart d’entre nous, les acteurs, ont leurs épreuves à traverser, j’ai eu les miennes. Parfois j’aime discuter avec des gens ayant vécu les mêmes difficultés que moi. Ça me donne des solutions pour les surmonter. Donc si je peux donner des conseils aux jeunes acteurs voulant entrer dans ce métier ça me fait plaisir.
Patiente et persévérance sont les qualités les plus importantes pour réussir dans le show-business, le talent c’est bien mais ce n’est pas suffisant.
Ecoutez la V.O :
Aléric Flair: merci beaucoup au nom des lecteurs de Etreacteur.fr
Dolph Lundgren – Merci beaucoup ! C’était avec plaisir, c’était de bonnes questions.
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Interview de Dolph Lundgren partie 1
Interview de Dolph Lundgren partie 2 : Comment s’entrainer pour préparer un film d’action
Retrouvez l’intégrale de cette interview de Dolph Lundgren en anglais dès maintenant.
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